Une unicité absolue dans le monde arabe
Le Maroc, en arabe le Maghreb, a prêté son nom espagnol – Marueccos à la désignation conventionnelle, en arabe classique (littéral) d’Occident, par opposition à l’Orient arabe, le Machrek. Il est en fait le cœur de ce second islam du Couchant, qui est apparu rapidement, au sein de l’Empire islamique, comme l’autre pôle fondamental de l’identité islamiste. Il s’agissait alors – ce que l’on a oublié aujourd’hui – d’un ensemble géographique précis. Un ensemble dont le détroit de Gibraltar était alors le trait d’union. Depuis cette date pivot de notre modernité, 1492 donc, la prise de Grenade et la soumission avec élévation au statut de grand d’Espagne du dernier des Abencérages, c’est aussi le sort des 15 pour cent environ de juifs d’Espagne et du Portugal encore majoritaires dans la plupart de ces grandes villes, de Lisbonne à Séville à Avila, pour finir par Barcelone, la perle de la Méditerranée juive, dont la communauté essaima bien vite à Gênes (Christophe Colomb et sa famille venue du lointain Portugal), Livourne, Rome et Naples, dont proviennent tous ces juifs grana (de Grenade) qui retrouvèrent la liberté grâce à l’Empire ottoman, à Tunis, pour beaucoup d’entre eux au Cap Bon, à Sfax, et à Tripoli. Il n’en reste pas moins que, de toute cette odyssée séfarade, dont l’Espagne fut longtemps le point névralgique, c’est bel et bien le Maroc, grâce à la résistance héroïque de ses rois au XVIe siècle, qui y joua le rôle essentiel, pour accueillir la plupart des fugitifs de la péninsule ibérique, ceux qui s’appelaient eux-mêmes « les fugitifs » (megorachim). Comme si, dans leur inconscient, la fuite d’Espagne représentait, certes, l’écho lointain, mais aussi le relai de la fuite d’Eretz Israël. Ici aussi, une identité remarquable est entrain de se faire jour. Elle produit quatre phénomènes absolument bouleversants dont il me semble diff ...
