Shmuel Trigano: le vote de l’Unesco, un événement total

De la même façon que le sociologue Marcel Mauss parlait d'un "fait social total", le vote récent de l'UNESCO[1] est un "événement total", c'est à dire une manifestation de la réalité  dans laquelle se retrouveraient toutes les strates de la socialité et se miroiteraient de multiples perspectives (politique, religieuse, économique, juridique...). Comme si la situation globale se donnait à lire dans un événement singulier.1)Le fait le plus puissant et le plus "irradiant" que cet événement donne à voir concerne la condition juive. Le verdict de ce tribunal inique prétend annuler, par la force de son verbe, 30 siècles d'histoire juive, qu'il réécrit entièrement à l'avantage de la vision ethnocentrique de l'islam[2], au déni - faut-il le rajouter - de l'histoire chrétienne de l'Occident. Le récit de la réalité historique et politique qu'il tente d'imposer dénie aux Juifs leurs droits religieux les plus fondamentaux et implique que les assertions du judaïsme quant aux lieux et au contenu de son histoire ne sont que des mensonges. C'est une agression symbolique de la personne juive dans toutes ses dimensions, une délégitimation qui porte en puissance une violence totale à son égard. Elle ne vise pas seulement la sécurité des Juifs: elle concerne l'essence de l'existence juive.2)Qu'une institution censée défendre "le patrimoine de l'humanité" se prête à une telle forfaiture dévoile la corruption profonde de la pseudo "communauté internationale". Elle montre que nous sommes dans une jungle où tout peut arriver. C'est la figure de Sodome qui y montre son rictus, Sodome où les principes de la justice étaient invoqués pour perpétrer le crime. L'UNESCO n'agit ainsi pas autrement que l'Etat islamique à Palmyre et les islamistes devant les Bouddhas de Bamian.3) Plus grave: qu'une institution politique et culturelle réécrive l'histoire de façon révisionniste au mépris le plus clair des faits historiques est le signe d'une nouvelle période noire pour l'intelligence humaine. Nous y sommes depuis une vingtaine d'années, concernant le peuple juif et le judaïsme, objets, jusque dans les études juives, d'une réécriture de son histoire et de sa réalité, sur la foi de modes idéologiques qui, toutes, émargent à l'idéologie dominante de notre temps, le postmodernisme, un post-marxisme propre à l'âge de décomposition de l'Occident dans lequel nous sommes entrés[3]. Cette réécriture est devenue une vérité officielle assénée au plus haut niveau par les institutions réputées "académiques", dont les représentants entendent bien faire respecter leur loi exclusive et donc imposer le silence ou l'exclusion à ceux qui contreviendraient à cet ordre de pouvoir. Arrive un temps ou la science et l'idéologie se confondront.Que la résolution ait été portée par des pays arabes qui, à l'exception de l'Algérie, sont réputés "modérés", donne la mesure du profond ressentiment envers le peuple juif qui hante le monde musulman, et de l'intolérance qui y sévit. Qu'élever une prière sur le Mont du Temple ou s'y prosterner devant un Dieu qui est censé être le Dieu révéré par toutes les religions soient perçus par les musulmans comme une provocation  et un sacrilège pose question. Qu'Israël, semble-t-il, collabore en sous mains avec plusieurs de ces pays contre l'impérialisme iranien, fait douter de la reconnaissance et du respect qu'implique cette coopération du côté des puissances musulmanes sunnites. Le déni de l'être juif reste intact.4)Que la France ait voté pour cette résolution implique une atteinte aux droits religieux des Juifs français, le droit de se rendre sur leurs lieux saints et de voir respectée leur identité historique. Que ce vote favorise l'islam et son récit théologique à l'encontre des autres religions, conduit à se demander, comme l'archevêque Lustiger il y a quelques années, si l'islam occupe objectivement en France le statut d'une religion d'Etat, ce que le discours du gouvernement socialiste illustre dans les faits, quand il pose des affirmations au nom de cette religion. Dès lors il apparaît que la seule "reconnaissance" dont les Juifs jouissent concerne la victimitude liée à la Shoah et non leur identité historique.5)Peu se sont rendus compte que ce ne fut pas seulement la sécurité des Juifs qui a été visée depuis le début des années 2000 mais aussi le judaïsme lui même, dans ses symboles et ses aspects les plus cruciaux, et ceci dans l'arène culturelle et intellectuelle, alors que l'islam occupa toutes les scènes et fut à l'abri d'une censure répercutée par tous les médias et les discours politiques et intellectuels. Le vote de la France, comme l'existence même d'une telle résolution de l'UNESCO, montre que ces jugements sur l'histoire juive ont une portée politique très concrète dans la réalité. La menace dont les Juifs sont l'objet, en France et en Europe de l'Ouest, de la part de milieux islamiques n'a ainsi au ...

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