Shelomo Selinger : « Sculpter m’a fait recouvrer la mémoire»

Actualité Juive : Vous avez eu mille vie en une. Pouvez-vous nous témoigner de la première partie, rythmée par la guerre ? Shelomo Selinger : Quand la guerre a commencé, j’avais onze ans. Au départ en Pologne, il y avait des restrictions pour les juifs : ils ne pouvaient travailler que dans les « corvées ». On devait dégager la neige dans un abattoir à l’extérieur. Un jour, toute la ville devait assister à la pendaison d’une douzaine de personnes. J’étais en face de l’arbre où mon moniteur de mouvement de jeunesse sioniste allait être pendu. Avant de mourir, j’ai entendu sa dernière prière, il récitait le chema Israël, mais il n’a pas pu le finir. C’était le début de la mort et de la guerre pour moi. Au moment de la sélection, ceux qui étaient programmés pour mourir allaient à Auschwitz, les autres, aux travaux forcés en Allemagne. Ma mère et ma petite sœur se sont échappées, mais mon père et moi avons été pris. Lors de la sélection, j’ai été séparé de mon père car j’étais trop jeune : je devais être liquidé tout de suite. Un homme d’affaires devenu policier juif du ghetto m’a dit devant les nazis : « Tu as 17 ans ! Qu’est-ce que tu fous là ? », et il m’a poussé de l’autre côté de la file. Et je suis allé de l’autre côté. Voilà le commencement de ma survie. Au départ avec mon père, j’étais au camp de concentration de Chrzanow. Nous creusions des fondations pour l’usine Krupp. Au bout de trois mois, mon père a commencé à faiblir. On m’a dit qu’on l’envoyait dans un « camp de la convalescence ». En fait, on l’envoyait à la mort. On l’a assassiné en lui introduisant un tuyau d’eau dans la bouche pour l’étouffer de l’intérieur. Je l’ai appris après la libération. Lorsque mon père est parti, je suis resté tout seul dans l’enfer. Chaque fois que j’étais malade, battu, à bout, quelqu’un me donnait un coup de main pour que je survive. En tout, je suis passé par neuf camps de concentration. Après ma deuxième marche ...

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