Que faut-il attendre du procès en appel ?

Des onze condamnés en première instance par la cour d’assises spécialement composée, seuls Ali Riza Polat et Amar Ramdani avaient interjeté appel. Le procès qui s’est ouvert à la cour d’appel de Paris, lundi 12 septembre, rejuge ces principaux accusés. Le verdict est attendu le 21 octobre.

QUI SONT LES APPELANTS ?Ali Riza Polat et Amar Ramdani, les deux condamnés en première instance qui, tout au long des trois mois du procès de 2020, ont tenté de nier leur implication dans l’entreprise terroriste d’Amedy Coulibaly et des frères Kouachi, en prétendant notamment qu’ils ne connaissaient pas leurs motivations.
Souvent intempestif, Ali
Riza Polat, ami d’enfance de Coulibaly et défavorablement connu des services de police,
a plus d’une fois hurlé qu’il était « innocent », depuis le box des accusés. L’enquête avait pourtant permis de démontrer, entre autres, qu’il avait rencontré Coulibaly les 5, 6 et 7 janvier 2015, soit juste avant la commission des crimes de Montrouge et de l’Hyper Cacher. Polat s’intéressait aussi à l’État islamique, avait révélé l’examen de son ordinateur et, juste après les attentats, il aurait cherché à gagner la Syrie en partant pour le Liban. Il avait été condamné à trente ans de réclusion criminelle pour « complicité » de crimes terroristes. Quant à Amar Ramdani, il a été condamné en première instance à vingt ans de réclusion pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, pour avoir aidé Coulibaly à acquérir des armes et en se rendant à six reprises dans la région lilloise avec Saïd Makhlouf, un cousin éloigné, entre octobre et décembre 2014.

QUI SERA APPELÉ À LA BARRE ? De nombreux témoins seront appelés à venir, voire à revenir, pour parler des attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de l’Hyper Cacher. Pour les témoins qui ne pourraient
pas revenir, la justice dispose néanmoins des notes d’audience qui ont été prises lors du premier procès. Zarie Sibony, la caissière et otage de l’Hyper Cacher dont le témoignage avait été retentissant ne devrait pas revenir pour assister au procès en appel, nous dit son avocat, Me Élie Korchia. Tout comme lors du procès en première instance, ce dernier représentera les deux caissières et anciennes otages, Zarie Sibony et Andréa Chamak.« Je mettrai la thématique de la haine des juifs au cœur du procès en appel, comme en première instance. Dans son arrêt, la cour d’assises avait bien mis en exergue l’importance de la dimension antisémite de ces attentats », explique-t-il.

DES ÉLÉMENTS NOUVEAUX PEUVENT-ILS APPARAÎTRE ? A priori non, dans la mesure où le dossier, constitué à l’issue des cinq années d’enquête, demeure le même. Les auditions et les dépositions à venir
au cours des six semaines d’audience laissent néanmoins la possibilité de faire apparaître de nouveaux éléments.

QUELS SONT LES ENJEUX ? Savoir, d’une part, si la cour d’appel va confirmer les condamnations prononcées en première instance. Celle d’Ali Riza Polat, « la complicité d’assassinat terroriste » , représente un chef d’accusation particulièrement grave. En 2020, la cour d’assises spécialement composée avait aussi clairement mis en exergue les motivations contextuelles de ces assassinats. À savoir, « une tuerie terroriste organisée, avec des symboles forts qui avaient été visés ». La cour d’assises avait aussi expliqué dans
sa décision qu’en attaquant l’Hyper Cacher, un vendredi après-midi, le terroriste voulait attaquer la communauté juive, comme il l’avait fait précédemment en attaquant un symbole de la presse française ainsi que des forces de l’ordre. Tout ceci devrait, espère-t-on, être confirmé.
Connaître d’autre part le quantum des peines qui seront prononcées. Suite à l’appel interjeté par les deux accusés, le parquet avait formé un « appel incident » pour donner à la cour d’assises amenée à les rejuger la possibilité d’aggraver les peines prononcées en première instance. Il y a donc une possibilité pour qu’in fine, Ali Riza Polat ou Amar Ramdani soient condamnés à des peines de réclusion supérieure à trente et vingt ans.