Pour les Juifs qui resteront, redéfinir les conditions d’une continuité juive en France. Par Shmuel Trigano

J'ai tenté de définir dans un texte précédent le critère qui me semble devoir guider le choix existentiel auquel les Juifs de France sont confrontés aujourd'hui. Je voudrais dans ce texte formuler les questions qui se posent à ceux qui resteront et dans un troisième article à ceux qui partiront. J'ai avancé [1] que, dans les faits, l'identité juive française d'après guerre, dont nous sommes les produits, n'est plus portée par la société française, elle même en profonde mutation. C'est ce qu'a illustré sur le plan idéologique, durant les quinze dernières années, un "antisionisme" diffus dans toute la société et la scène publique - et qui n'est pas le lot des militants musulmans seuls. La meilleure preuve de cet état de fait s'évalue dans le courant d'émigration des Juifs qui ne se sont plus retrouvés dans leur monde, "chez eux", et qui en ont tiré la conclusion logique.Ce constat signifie qu'on ne peut concevoir de façon sérieuse et responsable une continuité juive en France si l'on reste dans la passivité, l'attente ou le pieux souhait, pire, la démobilisation (ah! le discours des "optimistes"). Il faudra au contraire développer une grande énergie pour entièrement repenser et réorganiser la vie juive afin de la hausser au niveau de la nouvelle réalité sociale, politique et idéologique, de ce qu'est devenue et va devenir la France. C'est en se mesurant au principe de réalité qu'on assure son existence. Or aujourd'hui, il y a un décalage total entre les cadres mentaux (et institutionnels) des Juifs de France et ce qu'est devenu ce pays. Pour recourir à une image, c'est comme si notre schéma corporel (mental) faisait obstacle à notre déplacement dans le paysage dans lequel nous nous trouvons: une source d'erreurs de jugement gravissimes. La pire des illusions serait de céder aux illusions de l'ambiance de compassion nationale (entretenue avec force cérémonies par le gouvernement Valls) qui a fait suite aux attentats de janvier. Il ne reste à la France en crise que l'invocation de " la République" et les Juifs, comme on l'a vu dans le précédent article, n'ont effectivement pas d'autre alternative. Mais c'est là le problème car la République pourrait n'être aujourd'hui qu'un théâtre d'ombres à la lumière des comportements et des politiques de ses gouvernements successifs. Pour ce qui concerne les Juifs, la République est-elle toujours à l'œuvre quand l'Etat, pour gérer un problème de sécurité publique recourt, depuis la première guerre du Golfe, au "dialogue inter-religieux", aux religions donc, pour assurer l'ordre public? La laïcité est sans cesse invoquée mais l'Etat la met-elle en œuvre, quand l'islam est en jeu, "soluble dans la démocratie", ce qui n'est qu'une pétition de principe que la France n'a pas soutenue dans le passé pour les autres religions? Et la mise en parallèle permanente de la "communauté juive" avec la "communauté musulmane" n'a-t-elle pas installé une arithmétique malsaine et génératrice de jalousie, référant sans cesse la condition musulmane à la condition juive, au nom de l'égalité? Et qu'en est-il de la gestion  multiculturaliste de la vie publique, par les instances officielles, médiatiques, politiques, etc. ? Sommes-nous toujours en "République"? Les répercussions de l'intégration europ ...

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