La Turquie d’Erdogan « La dérive autoritaire »
Toujours candidate à l’entrée dans l’Union européenne, la Turquie poursuit un objectif autrement plus important pour elle : la reconstitution de la puissance impériale ottomane. Outre un dessein géopolitique, ce choix passe par l’affirmation de valeurs nationales et religieuses antilibérales, assumées de manière de plus en plus ouverte et agressive. Candidate à l’Europe depuis 1987, la Turquie sait aujourd’hui qu’elle n’a guère de chance de passer la porte : en octobre 2020 le Conseil de l’UE estimait que les négociations étaient « au point mort » avec Ankara. La Turquie a fait tout pour en arriver là : répression inimaginable d’un coup d’État, en 2016, dont l’ampleur a été surévaluée à dessein par Erdogan ; agressions verbales répétées contre des dirigeants européens ; passage à un régime présidentiel presque sans contrepoids ; chantage exercé sur l’Europe à travers la question des flux de migrants ; ingérence dans les affaires syriennes et dernièrement arméniennes en appui armé à l’Azerbaïdjan, occupation de Chypre-Nord qui continue… Erdogan a tout fait, sciemment, pour que l’Union européenne le laisse à la porte. Normal : lancée par ses prédécesseurs libéraux et de centre gauche, l’idée de l’adhésion va à l’encontre de son projet, qualifié de « néo-ottoman », certains évoquant même un « néo-califat ». Le parti conservateur islamiste qu’est l’AKP a un horizon intérieur : c’est la réislamisation du pays selon un modèle religieux proche de celui des Frères musulmans. Il dispose d’un soutien solide dans une partie de la classe moyenne et des couches supérieures de la population, objectivement gagnantes économiquement sur les 20 dernières années et rassurées par le fait que la Turquie est un des rares pays à avoir évité la récession en 2020. L’agenda politique intérieur turc est aussi bâti sur ...
