« Il y a mille façons d’être juif ; pour moi, c’est chercher à comprendre »
Laurent Dutheil a mené une brillante carrière politique jusqu’au poste de sénateur. Pourtant, depuis l’âge de 7 ans, il porte un lourd secret familial. Rencontre. Comment est né votre récit, J'ai 7 ans ? Laurent Dutheil : Je suis un enfant de l'après-guerre issu d'une famille juive au judaïsme sans pratique ni parole. Mes parents ne veulent plus parler ni entendre parler de ce qu'ils ont traversé aux temps maudits des peurs et du malheur. Ce n'est pas qu'ils ne m'ont rien transmis, c'est qu'ils ne m'ont rien dit. Ils ont préféré l'allusion à l'explication et ont considéré qu'il ne servait à rien de vivre sur une souffrance dont on ne peut rien faire, que le silence et l'oubli valaient mieux que les pleurs. Tenu dans l'ignorance des choses et privé de mémoire, le poids du secret est devenu mon identité secrète. Comment nager dans les eaux mêlées de ce que mes parents ne voulaient plus être, de ce qu'ils étaient encore et qu'ils ne souhaitaient pas que je sois. Que se passe t-il quand vous avez 7 ans ?L.D. : Après dîner, mes parents veulent que j'aille dans ma chambre, ils ont « un secret » à me dire : « Avant, tu étais trop petit pour comprendre. On peut te faire confiance ? Tu ne le diras jamais à personne ? Si tu en parlais, il pourrait nous arriver des choses épouvantables. Voilà, tu es juif, toute la famille est juive. On a changé de nom. »Sur le moment, je n'attache aucune importance à cette annonce surprenante. La soirée tomba dans l'oubli et cette histoire dans le silence pendant longtemps. À 13 ans, vous faites votre « Bar-Mitsva » ?L.D. : À 13 ans, au premier jour de classe, en 4e, notre professeur de français nous fait jouer à un jeu reposant sur l'étymolo ...
