Gilles Kepel : « Les Russes ont besoin d’Israël »

Actualité Juive : Le jeune chercheur qui découvre le Moyen-Orient dans les années 1970, et dont on suit les premiers pas dans l’ouverture du livre, a-t-il finalement trouvé la clé de compréhension de cette région frappée par les crises depuis quarante ans ? Gilles Kepel : La clé, je ne crois pas, mais j’ai essayé de construire un tableau de pensée qui classe les faits, les hiérarchise, établit des filiations et des corrélations. L’objectif est de construire un grand récit des évolutions de la région depuis quarante ans, symbolisées par la première et la dernière carte qui accompagnent « Sortir du chaos » : celle-ci, relative à la guerre d’octobre 1973, met le conflit israélo-arabe au cœur de la région tandis que le conflit Est-Ouest domine le monde ; celle-là, en date de l’été 2018, voit le conflit sunnite-chiite devenir structurant, accompagné d’une fracturation du monde sunnite pour la lutte pour l’hégémonie et du retour de la Russie. Dans le même temps, Israël n’est plus désormais le principal « irritant » dans le système régional mais se trouve sur la même ligne que l’Arabie saoudite, tout étant l’allié non seulement des Etats-Unis mais aussi de la Russie. Une situation totalement inimaginable en 1973.  A.J.: Une partie de l’ouvrage est consacrée aux origines et aux conséquences des printemps arabes. Vous distinguez les insurrections du « premier type » de celles dites « du deuxième type ». Que recoupe cette classification qui semble échapper à la seule logique chronologique ?G.K : Les soulèvements arabes de 2010-2011 ont eu pour conséquence, pour les pays du littoral africain de la Méditerranée (Tunisie, Egypte, Libye), l’élimination du leader, sinon du régime. De l’autre côté, à l’est de Suez, au Bahreïn, au Yémen et en Syrie, ces soulèvements ont été pris en otages par les fractures confessionnelles préexistantes, notamment sunnites-chiites, et ont empêché que les régimes soient renversés. Ces insurrections se sont transformées en guerre civile dont la Syrie et le Yémen sont l’illustration, et Bahreïn l’avortement. A.J.: Des clivages confessionnels moins présents en Tunisie ou en Egypte ?G.K. : Dans les pays du littoral africain, la société est massivement sunnite, de manière plus ou moins homogène. En Tunisie par exemple, on ...

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