Eric Marty : « “Shoah” est plus qu’un simple film »

Actualité Juive: Votre premier texte s’intitule « Petite genèse philosophique du mot Shoah ». Pourquoi Claude Lanzmann a-t-il choisi de titrer ainsi son documentaire ? Eric Marty : Il faut enregistrer le fait que “Shoah” est plus qu'un simple film, et que son titre ne se contente pas de nommer une œuvre mais, très vite, avait nommé l'événement lui-même, devenu « la Shoah ». Or, ce fait, tout à fait exceptionnel, témoignait tout à la fois de la puissance symbolique de l'œuvre, mais aussi d'un tournant historique très profond dans la réception de l'événement historique. Par ailleurs, Lanzmann explique très bien comment il aurait bien voulu ne pas donner de titre à ce film, comment “Shoah” était aussi une façon de ne pas l'intituler. « Shoah » est un mot hébreu qui signifie « catastrophe » mais il a d'abord, aux oreilles de qui ne connaît pas l'hébreu, un effet immédiatement sonore, un « signifiant sans signifié », désignant alors parfaitement la « Chose », celle de la puissance d'anéantissement ou encore le néant. Le mot « Shoah » nomme, mais pas à la manière d'un nom commun qui, lui, nous rend disponible les choses, nous les rend familières, et les domestique. « Shoah » nomme tout en maintenant une sorte de voile opaque sur ce qu'il désigne. En ce sens, il s'oppose doublement au mot holocauste, mot d'origine grecque qui signifie « sacrifice ». « Shoah » n'est ni grec, ni religieux. Il ne porte en lui aucune de ces images vulgaires que véhicule le mot holocauste : le consentement, le clérical, la passivité, la rédemption, le spectacle, le rite, la rel ...

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