Arabie-Saoudite-Iran: l’escalade

Qui était le cheikh Al Nimr ? C’est une figure majeure du monde chiite que l’Arabie Saoudite a décidé d’exécuter samedi, entraînant une vague de contestations qui a embrasé toute la région. Téhéran, Bagdad, Ankara, Beyrouth, Cachemire : la mort d’Al Nimr a suscité des condamnations sans réserves des forces chiites de la région. Pour le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, elle « dévoile le vrai visage criminel, despotique, terroriste de l’Arabie Saoudite ». L’ayatollah Ali Sistani, autorité suprême des chiites d’Irak, partisan d’une ligne quiétiste, a néanmoins dénoncé « le versement du sang pur » du chef saoudien. Agé de 56 ans, le cheikh Nimr Baqr Al-Nimr s’était imposé comme le principal leader de la population de confession chiite du royaume wahhabite, où l’islam sunnite d’obédience wahhabite est religion d’Etat. Depuis le début des années 2000, ses prises de position contre la marginalisation politique et sociale des chiites lui avaient offert une aura grandissante. Emprisonné à plusieurs reprises, Al Nimr avait franchi un pas supplémentaire ces dernières années. D’abord en appelant publiquement, en 2009, à une sécession de l’est du pays. Le cheikh imaginait une union avec la minorité chiite du Bahreïn (21%), sous la coupe des Al Khalifa, la famille régnante sunnite qui n’avait pas hésité en 2013 à appeler à l’aide les Saoudiens pour écraser le soulèvement de sa minorité, en 2011, en plein printemps arabe. En 2012, une vidéo le montrant satisfait de la mort  du ministre de l’Intérieur, le puissant Nayef, soulève l’ire du palais. En indiquant espérer « que les vers […] mangent » celui qui était à l’époque le prince héritier du roi Abdallah – mort en 2015 -, le leader chiite franchit une ligne rouge. Arrêté la même année, Al Nimr est condamné à mort en 2014 pour « terrorisme », « sédition », « désobéissance au souverain » et « port d’armes ». Sa mise à mort au côté de quarante-six autres personnes n’en a pas moins surpris les chancelleries internationales.Pourquoi l’Arabie Saoudite l’a-t-elle exécuté ? Les remises en cause récurrentes du pouvoir et de l’intégrité territoriale du pays avaient valu à Nimr d’être depuis longtemps dans la ligne de mire des autorités saoudiennes. Pour la dynastie des Saoud, Al Nimr incarnait la menace d’une insurrection à sa frontière orientale, où réside la majorité des 15% des chiites du pays. La province d’Ach Charqiya présente un intérêt stratégique sur un autre plan : les principaux puits de pétrole nationaux y sont concentrés, en particulier dans l’oasis d’Al Hassa. Alors que sa stratégie de pétrole à bas prix, pour étouffer dans l’œuf l’expansion du gaz de schiste américain, a grevé ses finances (déficit de 98 millions de dollars l’an dernier et des réserves de devises en chute nette), dans une économie très peu diversifiée, l’Arabie Saoudite surveille ...

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