Alexandre Del Valle géopolitologue :« L’Etat islamique joue sur le choc des civilisations »
Actualité Juive : Vous vous montrez critique de la stratégie adoptée par la France depuis le début du conflit en Syrie. Selon vous, l’exigence d’un départ immédiat de Bachar El Assad n’était pas justifiée d’un point de vue stratégique. Alexandre Del Valle : La stratégie, ce sont d’abord des rapports de force. Dès le début de la guerre, on s’est focalisé sur des islamistes soi-disant modérés pour vaincre Bachar El Assad. En réalité, ceux-ci ont très vite été pénétrés par des islamistes très radicaux. On parlait aux « modérés » de l’Armée Syrienne Libre alors qu’elle était essentiellement composée de Frères musulmans. C’est une grave erreur ! Nous avons vendu ou donné des armes à ces groupes qui ont fini par atterrir entre les mains des légions de Daech ou du Front Al Nosra. On a cru que l’on pouvait renverser le régime et ne pas faire le jeu des islamistes radicaux. Or en stratégie, l’une des règles de base est de hiérarchiser l’ennemi. Contre Hitler, l’Occident libéral et capitaliste s’est allié à Staline. L’Occident avait conscience à ce moment-là qu’on pouvait s’allier avec la peste pour vaincre son ennemi principal. Aujourd’hui, les dirigeants occidentaux ont cru pouvoir ne pas choisir entre la peste et le choléra. Mais la priorité aurait été d’éliminer l’ennemi le pire. Certains responsables américains ont considéré que le principal danger était Assad. On a notamment entendu ce discours chez le sénateur John McCain, ancien candidat à la présidentielle américaine, ou chez les néoconservateurs. C’est à mon avis une position respectable mais risquée. Quant à la France, elle a adopté une solution bâtarde en tablant sur les modérés à la fois contre Daech et Al Nosra d’une part, et contre le régime d’autre part. Or nous n’avons que deux solutions : soit s’allier aux islamistes, à tous les islamistes, soit accepter de composer avec le régime ne serait-ce que pour obtenir l’ouverture de couloirs humanitaires. Nous aurions dû commencer par privilégie ...
