Delphine Horvilleur : « Mon attachement à l’histoire juive française »

Dans son dernier ouvrage, Vivre avec nos morts, paru chez Grasset, la rabbin Delphine Horvilleur, directrice de Tenou’a, parle de la vie, de la mort, de sa vocation de rabbin, de la place du judaïsme dans la République… Actualité juive : Que retenez-vous de l’enseignement de Haïm Korsia, aujourd’hui grand rabbin de France, et qui fut, auparavant, votre professeur, au Talmud Torah à Reims ?Delphine Horvilleur : Haïm Korsia a eu un immense impact sur toute ma génération et sur tous les jeunes juifs champenois qui ont croisé sa route au Talmud Torah de Reims, notamment. J’ai une immense reconnaissance envers lui. Il a su incarnerpour nous un judaïsme vivant, intelligent, engagé dans la Cité et soucieux des autres. Je me souviens de nos discussions sur Israël, sur la France et sur nos engagements républicains. Il est toujours, à mes yeux, une figure forte et une voix claire, la voix d’un puissant attachement à la France et à Israël.Il est resté très proche de ma famille, et notamment de mon père qui est président de la communauté d’Epernay. Vous avez étudié la médecine, qu’est-ce qui vous a attirée vers cette discipline ?D.H : Je suis partie vivre en Israël à l’âge de 17 ans, où je suis restée près de 5 ans. A cette époque, très peu de juifs français faisaient leur Alyah. C’était entre 1992 et 1997… soit les « années Oslo ». Quand le premier ministre Yitzhak Rabin a été assassiné en 1995, j’ai décidé de rentrer en France pour quelques mois… qui finalement m’ont menée vers d’autres lieux et horizons. Que gardez vous de votre premier métier de journaliste ?D.H : J’ai eu la chance de travailler pour des rédactions très diverses : pour le Yediot Aharonot en Israël, pour la presse quotidienne régionale française et pour Libération, puis pour France 2, où j’ai passé quelques mois au bureau de la chaîne à Jérusalem en 2000 lors des débuts dela 2ème Intifada. C’est après cette période que j’ai intégré la rédaction du 20 heures de France 2 à Paris et travaillé aux cotés de David Pujadas. Avançons dans votre parcours…Comment devient-on Madame le rabbin ?D.H : J’ai eu un long parcours fait de virages multiples, et il m’a fallu longtemps pour trouver cette voie. Ce chemin passait pour moi par la faculté de médecine, puis par le journalisme.Ce n’est qu’en 2002, lors de ma découverte du judaïsme américain à New York, que j’ai pu commencer à envisager ce tournant dans ma vie. J’ai découvert là-bas la richesse du pluralisme juif américain, le respect de la diversité des sensibilités juives, et cela a tout changé pour moi. J’ai rejoint à Manhattan une yeshiva orthodoxe dans laquelle j’étudiais le matin, et un séminaire massorti où j’étudiais le Talmud l’après-midi. Je n’avais jamais rencontré cette ouverture d’esprit ni en France, ni en Israël. Tout à coup, je fréquentais des hommes et des femmes rabbins, et un jour l’un d’entre eux m’a dit : mais avec ton parcours et ton amour de l’étude, pourquoi ne pas l’envisager ? Tout devenait possible. Après 5 ans d’études, j’ai obtenu une smi'ha en 2008. On m’a proposé un poste à New York mais je me sentaisune responsabilité vis-à-vis du judaïsme français et d’une voie progressiste qui m’y avait manqué. C’est ainsi que je suis devenue rabbin au MJLF. Je salue le chemin de Pauline Bebe, la première femme rabbin française. De bien des manières, elle a ouvert la voie ici. Pourquoi choisir le judaïsme libéral ?D.H : Les étiquettes m’intéressent peu. Je me reconnais dans un judaïsme qui croit en l’évolution de la tradition, qui prend en considération le contexte politique et sociétal et son dialogue avec la Halah’a. En cela, je ne suis sans doute pas en phase avec un certain discours orthodoxe qui nie l’impact de l’histoire sur la loi juive et son interprétation.La place des femmes dans l’institution religieuse en est une bonne illustration. Parce que le rôle des femmes a évolué dans l’espace public et politique, il me semble que le judaïsme doit lui aussi penser leur place politi ...

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