
MÉMOIRE Nombreux sont ceux qui, sur les neuf heures de Shoah, indiquent avoir été plus particulièrement marqués par une séquence gravée en eux comme une persistance rétinienne. le journaliste Jonathan Freedland n’avait, alors, que dix-neuf. Dix neuf ans… Précisément l’âge auquel l’un des hommes interviewés par Lanzmann déclare qu’il s’était évadé d’Auschwitz. « Je n’ai jamais oublié son nom ni son visage » écrit Freedland, stupéfait de constater combien l’histoire de Rudolf (Rudi) Vrba - Juif slovaque né Walter Rosenberg- était tombée dans l’oubli. Il était évident, pour lui, que le récit de sa vie méritait de figurer aux côtés de ceux d’Anne Frank, d’Oskar Schindler et de Primo Levi. « Ce jour ne viendra sans doute jamais » écrit-il, quand bien même son enquête, nourrie à des sources inédites, a été classée par le Time dans la liste des vingt meilleurs livres de l’année 2022, en tête des best-sellers dès sa sortie au Royaume-Uni et quatrième dans celle établie par le New York Times à sa sortie en poche. Sans doute faut-il savoir rencogner les scrupules surgissant à l’idée de parler, pour un tel sujet, de « best-sellers » et se réjouir de célébrer, selon les mots de l’écrivain et avocat Philippe Sands, un livre « merveilleux, méticuleux et passionnant ». Grâce à une série d’entretiens avec les deux épouses de Vrba, aux souvenirs de ses petits-enfants, à une valise remplie de lettres, des conversations avec des historiens, des collègues de travail, des témoignages de survivants, des archives et des textes écrits par Rudi lui-même, c’est un livre bouleversant et déconcertant qui nous parvient aujo ...